Dans l'antre de la chauve-souris [Ft. Bruce Wayne & Cassandra Cain]

Batwoman était en place, perchée sur la gargouille en pierre de l’un des nombreux immeubles qui entourait le zoo de Gotham. Elle s’étonnait encore de la rapidité à laquelle sa nouvelle alliée potentielle avait réparée son masque. Mais surtout, elle était impressionnée de la qualité du zoom optique qu’elle y avait intégré en un temps record. La petite était d’une intelligence incroyable, et malgré son absence de d’aptitudes sociales et son incapacité à communiquer, se révélait également être d’une vivacité d’esprit hors du commun. Katherine osait à peine imaginer le flot incessant d’idées plus ou moins saugrenues qui semblait traverser l’esprit de Liu en permanence. Elle revoyait le regard déterminé de cette jeune fille atypique, pleinement concentrée à l’idée d’améliorer le masque de la justicière. La voir à l’œuvre était aussi beau qu’attendrissant. Elle se remémorait les tics corporels et le regard constamment fuyant d’une jeune femme qui n’avait probablement pas eu une enfance très tendre. Une jeune femme à qui la vie n’avait jamais fait aucun cadeau. Une écorchée vive, comme elle. Katherine se surprenait également à l’admirer mettre du cœur à l’ouvrage dans le silence le plus total. Les trois heures nécessaires à l’ajout d’un système de zoom optique passèrent bien plus vite qu’escompter.

Le génie de Liu semblait sans limite et ses compétences d’informaticiennes n’étaient pas en reste, semblant à première vue dépasser celles de Mary, qui avait pourtant vouée sa vie à l’informatique et à l’étude des systèmes électroniques et de communications. Le nombre et la diversité folle des appareils électronique que Kate avait aperçu dans ce petit appartement de Chinatown semblait dépasser l’entendement. Elle y remarqua des objets dont elle ne connaissait pas le nom, appareils dont elle ne connaissait même pas l’existence. Curieusement, Liu faisait preuve d’une organisation irréprochable, aussi bien dans l’agencement de son appartement que dans sa manière de travailler. Était-ce une forme d’autisme ? Certainement, mais Kate ne maîtrisait pas du tout le sujet.

Comment s’était-elle procurée tout ce matériel ? La question effleura l’esprit de Kate, mais la balaya bien vite. À son âge elle volait dans les stocks de l’armée américaine et passait des marchés avec des trafiquants, marchands douteux et autres contractors pour se fournir en matériel. La justicière ne pût retenir un sourire en songeant à ces années passées.  

Liu était incroyable. Une collaboration serait très certainement enrichissante pour tout le monde. Tout le monde n’approuverait peut-être pas, Bruce le premier. Mais était-ce réellement un problème ? Ce serait simplement un autre secret à cacher à son ancien mentor. Un cas de conscience se posa néanmoins pour la justicière. Était-ce bien raisonnable d’impliquer Liu dans sa croisade contre le Crime ? En faisant ainsi, ne reproduisait t’elle pas exactement le même schéma que Bruce avec ces recrues toujours plus jeunes envoyées à l’abattoir ? Les visages de Jason, Tim, Damian, Barbara, Cassandra et tous les autres envahirent l’esprit de la justicière. Non, ce n’était pas raisonnable. Mais Mary était-elle vraiment plus âgée lorsqu’elle découvrit les activités de sa demi-sœur ? Mary, n’était-elle pas bien à l’abri dans cette pièce secrète du Manoir Hamilton ? Avait-elle déjà encouru un quelconque danger ? Bien sûr que non. Mary avait toujours été en sécurité, car ça avait été, et c’était toujours la priorité de Katherine. Préserver la sécurité de ses proches. Ainsi, elle imaginait déjà Liu et Mary travailler ensemble au Manoir Hamilton. Cette dernière se ferait d’ailleurs un plaisir de lui faire de la place et bien que Liu ne soit pas très loquace, elle aurait un peu de compagnie. Mary aurait un peu de mal à s’habituer au fait que la jeune femme utilisait constamment un carnet pour communiquer, mais elle avait bon espoir que ces deux électrons parviennent à s’entendre. Communication rendue d’autant plus difficile par les ignobles fautes d’orthographe qu’elle faisait. Toutefois, cela faisait partie intégrante de son charme, parti intégrante de ce qui la rendait si spéciale aux yeux de Kate. Peut-être Mary et Liu deviendraient t’elles finalement les meilleures amies du monde ? Un autre rictus se dessina sur les lèvres pourpres de Kate tandis que le ciel obscur s’assombrissait et que les nuages commençaient à pleurer sur la ville qui ne dort jamais.

Elle porta son regard en contrebas, il était presque minuit, et pourtant, les rues de Gotham ne semblait jamais désemplir. Cette ville n’avait pas volé son surnom. Elle pouvait entendre les voix des nombreux passants qui pullulaient sur les larges trottoirs. Parfois un éclat de rire. Quelques types un peu éméchés hurlaient parfois. Au loin, les sirènes de la police résonnaient, car tout comme cette ville, le crime ne dormait jamais. Un coup de feu retentissait, lointain. À peine perceptible. Peut-être même que ce surnom était lié à l’activité criminelle finalement. Kate n’avait jamais épluché les livres d’histoire à ce sujet. Elle jeta un œil aux autres gargouilles à côté d’elle, toujours personne.

Plus tôt dans la journée, elle était allée rendre visite à Bruce. Elle souhaitait lui emprunter le synthétiseur à ultrason qu’il avait utilisé contre la chauve-souris géante avant de lui sauver la mise lorsqu’elle enquêtait sur les disparitions inquiétantes à Otisburg. Ne souhaitant prendre aucun risque, elle avait demandé à ce qu’ils se rejoignent ici-même, sur les gargouilles de cet immeuble orné d’une longue enseigne verticales aux lettres rouges fluo éclairés avec des néons : CAROLINE. C’était le panneau qui indiquait la boutique de cosmétique du rez-de-chaussée.

Plusieurs klaxons retentirent tandis qu’un accident manqua de se produire en contrebas, Katherine reporta ensuite son attention sur le zoo de Gotham, un peu plus loin. Bien évidemment désert. Parfois, elle apercevait un rayon lumineux, celui de la lampe torche du gardien qui effectuait sa ronde. Le parc était calme. Derrière elle, le grondement sourd du métro de Gotham retentissait. Un bruit caractéristique attira finalement son attention. Celui d’une batgriffe qui se plantait dans un mur.

- Enfin, se plaignit Kate, laconique et un peu lasse tandis que le Chevalier Noir prenait place sur une gargouille à sa gauche. Elle ne daigna pas le regarder, un peu anxieuse quant aux événements récents.

Kate avait peur qu’il ne la sermonne, la harcèle de questions. Pourquoi un homme avait-il été tué par sa faute ? Pourquoi avait-elle combattu la Police ? Kate s’imaginait tout un tas de questions qui pouvaient traverser l’esprit de Bruce. Et à chacune de ces questions, elle imaginait tout aussi bien le lot de reproches et d’avertissements qui allaient avec. À raison de cela dit. Katherine était consciente qu’elle était certainement peut-être allée un peu trop loin la nuit dernière. Mais n’était-ce pas ce qui lui avait permis d’obtenir l’identité de sa chauve-souri géante ? C’était un mensonge qu’elle s’imposait à elle-même, car Maggie l’avait exhortée à cesser les poursuites.

Et en parlant de chauve-souris, certainement que Bruce voudrait également savoir pourquoi elle tenait tant à obtenir son synthétiseur ce soir-là. Kate était non seulement prête à s’expliquer sur les faits de la nuit dernière, mais également à lui détailler le plan d’action de ce soir. Peut-être voudrait t-il se joindre à la fête ? Peu probable, le Chevalier Noir avait d’autres chats à fouetter. Des affaires bien plus importantes à traiter. Cette possibilité plaisait à Kate qui se plaisait à jouer la louve solitaire quand Cassandra ne débarquait pas inopinément pour lui sauver la vie. Un troisième rictus illumina ses lèvres. Elle daigna finalement regarder son ancien mentor dans les yeux, perché à ses côtés tel une statue grecquo-romaine.

- Tu as ce que je t’ai demandé ?

Subitement, une pensée incongrue et qui n’avait strictement aucun rapport avec l’objet de leur rencontre ce soir fît irruption dans la tête de Kate. Comment Cassandra et Liu avaient-elle été capables de communiquer lors de leur première rencontre ? Kate se retint d’éclater de rire en imaginant les grommellements de Liu répondre aux mono-syllabes de Cassandra.

- Je l’ai, répondit Bruce, mais avant tout tu vas me dire pourquoi tu pourchasses Man-Bat. Katherine soupira. Bien évidemment, il connaissait cette chose qu’elle pourchassait. Bien évidemment…
- Alors c’est son surnom… Man-Bat hein… Répéta t-elle, l’air las, songeant à son affrontement avec la chauve-souris géante qui avait failli lui coûter la vie.

Katherine baissa la tête un peu abattue en se remémorant la chance incroyable qu’elle avait eu ce soir-là. Bruce l’avait tiré d’affaire et elle lui devait la vie, pour ça, mais également pour ce qu’elle était devenue grâce à celui qui fut son mentor durant de longues années. L’eau de pluie déperlait sur son masque, glissait sur ses joues et dégoulinait le long de son nez. Du coin de l’œil, elle croisa le regard également masqué du Chevalier Noir qui la fixait intensément. Probablement, sondait-il son âme et mesurait les prochaines paroles de Katherine qui songeait à lui mentir. Elle ne souhaitait pas qu’il s’immisce dans ses affaires et éprouvait toujours un peu de rancœur pour les raisons qu’il avait invoqué pour lui faire rendosser le costume. Elle repensa à Jason, toujours porté disparu, elle n’avait aucune piste concrète. Kate serra les poings, le cuir de ses gants grinça puis elle releva la tête pour confronter le regard de son mentor.

Malgré tout ce qui les séparait aujourd’hui, elle ne pouvait s'empêcher d’aimer Bruce. Pas en tant qu’amant, pas en tant que mari ou compagnon. Non. En tant que frère. Malgré tous les secrets qu’il gardait pour lui, malgré tous les reproches qu’il faisait aux autres pour les préserver du danger et sa conception trop idéaliste de la Justice, Katherine l’aimait. Elle se décida enfin à répondre à sa question, sans dévoiler l’intégralité des cartes qu’elle avait en main.

- Cette bestiole a tenté de me tuer la dernière fois que j’ai croisé sa route. Alors c’est très simple, fit-elle, Je vais faire ce que le Chevalier Noir aurait dû se faire lorsqu’il a pris le temps de lui trouver un surnom. Au passage, je lui rendrai également la monnaie de sa pièce. conclut finalement Kate avec acidité. Mais elle regrettait déjà les mots qu’elle venait de prononcer. Elle savait à quel point son mentor était déchiré intérieurement par sa lutte contre le Crime. Lui aussi souffrait, même s’il ne le montrait jamais. Car sous cette armure, ce n’était qu’un homme, comme elle. Elle reprit, plus sereinement, mais ne s'excusa pas. Écoute, Bruce, je… Donne-moi simplement le synthétiseur, et laisse-moi m’occuper de ça. Gotham a besoin de toi. Une guerre des gangs se prépare avec la montée en puissance de Double-Face, le Joker a disparu et prépare certainement quelque chose d’atroce et… Elle marqua une pause et releva son masque afin que son mentor puisse mesurer toute la gravité de ses propos, mais également pour lui communiquer la sincérité dont elle faisait preuve aujourd'hui, l'air grave. La Police est à mes trousses, elle me tient responsable de la mort accidentelle d’un homme. Hamilton Hill ne nous tient pas en haute estime, et tu devrais peut-être prendre tes distances avec moi. Mes erreurs ne doivent pas t’éclabousser, Bruce, car tu représentes l’espoir pour cette ville. Et cet espoir, personne ne doit l’arracher aux citoyens de cette ville. Personne.

Elle tendit le bras vers le Chevalier Noir afin qu'il lui remette le synthétiseur à ultrasons. La pluie continuait de s'abattre sur eux et grimpait en intensité tandis que les sirènes des voitures de police continunaient d'hurler à travers la ville qui ne dort jamais.

- Cette fois tu n’auras pas besoin de voler à ma rescousse, je te le promets. Elle désigna l'appareil du menton. Pas avec ça. Le Batsignal illumina finalement subitement le ciel au dessus du zoo. Il n'était pas commun que le projecteur soit utilisé en raison de la réticence de la municipalité à accepter l'aide des Justiciers, son activation signifiait forcément quelque chose de grave. Kate reporta son regard vers la chauve souris qui illuminait les nuages gris. La belle Gotham a besoin de son chevalier, conclut la justicière en s'attardant sur ce symbole.

Il lui laissa le synthétiseur dans le creux de la main. Sans poser une seule question de plus. Bruce s’était simplement contenté de la prendre dans ses bras comme il le pouvait. Katherine était bouleversée. Elle voulut d’abord l’éloigner d’elle, mais elle se laissa finalement emporter par le torrent d’émotions qui la submergea bien vite.

Les évènements récents les avaient séparé, les années les avaient ensuite éloigné encore un peu plus. Aujourd’hui, Katherine se rendait compte que leur conception de la justice semblait prendre des chemins différents. Des routes si différentes que cela en effrayait parfois la justicière. Mais cette accolade avait tout balayé.

Pour la première fois depuis son retour en tant que Batwoman, Kate avait l’impression de renouer avec son ancien mentor. Bien sûr, Bruce restait Bruce, mais c’était comme si ce geste avait contribué à les reconnecter un tant soit peu. Peut-être la sentait-il s’éloigner de lui ? Percevait-il le fait qu’elle se détachait petit à petit de son influence ? Bruce était intelligent. Bien plus qu’elle ne l’était. Il ne faisait aucun doute qu’il se doutait de quelque chose. Il était inévitable que Bruce Wayne ait ressenti que quelque chose s’était brisé en elle.

C’est pour cette raison que Katherine préférait travailler seule, ou au moins, si elle devait être accompagnée, elle préférait que ce soit Cassandra qui soit à ses côtés. Pourtant, ce soir, elle travaillait en solo. Si ce type, Kirk Langstrom était vraiment la chauve-souris géante, alors il était hors de question d’exposer Cass. La jeune fille était certainement en train d’espionner Alfred en train de dormir à cette heure de la nuit. Ou sur le point de désobéir à l’interdiction de sortir seule. Un sourire en coin se dessina sur les lèvres de Batwoman à la simple idée d’imaginer Cassandra se glisser hors du manoir, comme elle sait si bien le faire. Elle la voyait encore une fois la prendre sur le fait et la sermonner. Cassandra tenterait de s’expliquer en grommelant des syllabes parfois incompréhensible, et son air de chien battu et incompris aurait finalement raison de Kate. Au fond, pouvait-elle lui en vouloir ?

La vie de justicier était si excitante pour les jeunes comme elle. Ils ne partageaient pas la même vision du monde. Ils n’étaient pas encore réellement confrontés aux problèmes d’adultes. La névrose se tapissait pas encore dans l’ombre de leur subconscient, prête à dévorer leur raison.

Mais la contemplation avait assez duré. Il était l’heure de passer à l’action. La louve protectrice qu’était Katherine devait laisser place au prédateur qu’incarnait Batwoman. Depuis cette gargouille sur laquelle elle se tenait, elle pouvait apercevoir trois rayons de lumière distincts à divers endroits du parc animalier. Les gardiens effectuaient leurs rondes. Elle ne voulait pas être dérangée durant ses investigations, elle décida donc de les mettre hors d’état de nuire.

La chauve-souris prit son envol et traversa l’avenue qui jouxtait le complexe de loisir. Elle survola les hautes clôtures en fer forgé et s’écrasa sur le premier garde qui patrouillait près des restaurants. Elle se laissa tomber de tout son poids sur le fonctionnaire. Ce dernier tomba lourdement contre le sol, et Kate percuta son crâne contre le sol, en jaugeant toutefois sa force. Il n’était pas nécessaire de faire preuve d’une violence excessive. Parfois, un simple coup suffisait à plonger un homme dans les vapes, et avec l’expérience, elle savait exactement comment procéder. Ce type aurait une vilaine bosse le lendemain, peut-être de légères séquelles. Mais il n’était pas mort. Encore accroupie sur sa proie qui venait de rencontrer Morphée, Batwoman tendit le bras pour projeter un batarang en direction d’une caméra de surveillance.

Sans perdre de temps, elle traversa la place commerçante du zoo, direction le poste de sécurité. Celui-ci était verrouillé à clé, mais elle avait pris soin de détrousser le gardien qu’elle venait d’assommer. Elle essaya plusieurs clés, jusqu’à trouver la bonne et enfin déverrouiller l’accès.

- Hé, on a un soucis avec la caméra du “Plaza”, fît le seul et unique garde du poste, enfoncé dans un siège en cuir, les yeux rivés sur les écrans qui transmettaient les images de vidéosurveillance. Tu peux aller voir ça ? C’est sûrement encore une foutue chauve-souris en train de grignoter les câbles.
- Tu crois pas si bien dire, répondît Kate, lugubre.
- Quoi ? L’agent de sécurité se releva d’un bond, voulu saisir son arme, mais Kate l’empoigna à la gorge tout en se saisissant d’un batarang qu’elle plaça sous ses yeux, bien en vue. Bordel, mais… Le fonctionnaire peinait à articuler quoique ce soit.
- Où est Langstrom ? grogna Batwoman en desserrant son emprise afin de laisser parler sa proie.
- Je ne sais pas !
- Tu mens, rétorqua Kate en armant un coup de poing de manière suffisamment menaçante pour que sa victime se mette à table.
- Allez vers la volière ! Vers la volière ! concéda t-il, plus paniqué que jamais. Bon sang, ne me faites pas de mal ! suppliait-il.
- Rappelles les autres gardiens, ordonna Batwoman en le relâchant. Pas de coup tordu. L’agent de sécurité s'exécuta, et contacta ses collègues par radio.
- Et… Et maintenant ?
- Dors.

Batwoman asséna un terrible coup de coude au niveau de la tempe du gardien qui s’écroula d’un trait sec contre le siège en cuir. Elle prit ensuite une profonde inspiration, et patienta assomma les gardiens un à un.

Nul doute que le paracétamol ferait parti de leurs huit prochains petits-déjeuners. Kate n’aimait pas infliger ce genre de choses aux innocents, mais si Kirk était dans son laboratoire et qu’il donnait l’alerte, ces gens se dresseraient sur sa route. Pire, ils pourraient se retrouver confrontés à la chauve-souri géante et risquer la mort. C’était une chose que Batwoman ne pouvait accepter. Elle ne risquerait plus la vie d’innocents.

Avant de quitter le poste, elle emprunta la carte d’accès d’un des gardiens, en espérant qu’elle lui permette d’accéder au laboratoire de Langstrom.

Elle se faufila dans le parc, détruisant chaque caméra sur son passage.

- Mary ?
- Je suis dans le réseau, toute la vidéosurveillance sera effacée d’ici quelques heures.
- Quelques heures ? s’étonna Katherine.
- Hé ! Pour un utilisateur lambda, ce genre d’opération prendrait plusieurs jours ! protesta Mary, certaine de son expertise en la matière.
- J’y suis, la coupa finalement Kate. La justicière se tenait désormais devant une lourde porte en métal à verrou électronique. Un lecteur de carte était disposé sur le mur qui la jouxtait. Elle passa la carte magnétique qu’elle avait dérobée, mais la porte refusa de s’ouvrir. Évidemment, souffla Kate avant de taper rageusement du poing. C’est verrouillé ! Evidemment que c'est une sécurité indépendante de celle du parc !
- Je ne suis pas sûre de pouvoir provoquer l’ouverture de la porte à distance …
- Merde ! hurla Katherine en frappant encore une fois la porte qui se déverrouilla finalement.

Surprise, Batwoman fit un bond en arrière, sur ses gardes, prête à riposter à n’importe quelle attaque. Mais rien, ni personne ne semblait ouvrir la porte. Elle s’approcha donc, et posa délicatement sa main sur la poignée. Elle prit une grande inspiration puis l’enclencha, tout en repoussant la porte sans jamais s’engager à l’intérieur.

Un escalier immaculé s’offrait désormais à elle. Au plafond, d’intenses néons à la lueur blanchâtre manquaient de l’aveugler.

- Je ne sais pas ce que tu as fais, mais ça a fonctionné.
- Justement, je n’ai rien fait, Kate, répondit Mary, méfiante. Si cette porte s’est ouverte et que tu as réussi à entrer…
- C’est que quelqu’un m’y a invité… continua sinistrement Batwoman. Il sait que je suis ici.
- Ça devient dangereux, Kate, s’inquiéta sa demi-soeur.
- Je sais, fît-elle, mais cette fois-ci, j’ai un As dans ma manche. Kate tata de ses doigts le synthétiseur à ultrasons qu’elle portait à la ceinture. J’espère obtenir des réponses.
- Et vous les obtiendrez, fît la voix d’un inconnu à travers le couloir. Certainement un système de haut-parleur étant donné la clarté du timbre de voix. Descendez me rejoindre, je vous en prie.

- Descendez me rejoindre, je vous en prie, l’invita cordialement Kirk Langstrom à travers les haut-parleur du laboratoire. Kate hésita un instant, le plan ne se déroulait pas vraiment comme prévu. Elle craignait que ce ne soit un vulgaire piège. Kirk était un chiroptérologue renommé. Capturer une chauve-souris s’avérerait pour lui être un jeu d’enfant. Mais Kate était particulière. Elle était fugace, maline et bien plus brutale que ses congénères. Elle n’hésiterait pas à mordre.
- C’est un piège, s’offusqua Mary à travers le masque.
- Ça y ressemble… Elle leva les yeux vers la caméra qui l’observait. Mais puisque je suis là, autant en finir. Elle haussa la voix pour être certaine que Kirk que le dispositif de vidéosurveillance capte bien le son de sa voix. N’est-ce pas, Docteur Langstrom ?
- Très juste, Batwoman, répondit-il sans détour. Finissons-en. Un sourire se dessina sur les lèvres de Katherine. Il relevait son défi. Parfait.

La chauve-souris s’engouffra dans l’escalier lumineux et se trouva face à une lourde porte à pistons. Un sifflement retentit, de la fumée se dégagea des pistons, et la porte s’ouvrit lentement pour lui permettre d’entrer dans le laboratoire. Kirk Langstrom, dos à elle, paré de son éternelle blouse blanche l’attendait au milieu de la pièce.

- Bienvenue, Batwoman, déclara le scientifique d’un air enjoué. Je savais que vous finiriez bien assez tôt par retrouver ma trace.
- Alors vous savez pourquoi je suis ici, répondit Kate, immobilisée devant le pas de porte.
- Malheureusement … se lamenta Langstrom en se retournant lentement. Le verre de ses lunettes reflétait la lumière des néons, camouflant ainsi ses iris. Je n’ai jamais voulu vous faire de mal. Que ce soit à vous, ou à qui que ce soit d’autres, déclara t-il ensuite avec une sincérité non dissimulée.
- Il faut mettre un terme à tout ça, docteur, rétorqua Katherine qui ne souhaitait pas dévier de son objectif initial. Elle était venue ici pour arrêter Langstrom, et aucune explication au monde ne pourrait justifier le charnier qu’elle avait retrouvé sous l’usine Ace Chemicals. Aucune excuse ne pourrait justifier les blessures qu’il lui a causé ce soir-là. Langstrom effectua une succession de mouvement de tête, puis il pointa du doigt le synthétiseur à ultrason qu’elle portait à la ceinture.
- C’est pour cette raison que vous avez apporté cet objet, je suppose. Katherine porta instinctivement une main à l’appareil, comme pour le cacher des regards. Je ne vous ferai aucun mal, soyez-en sûre, affirma t-il ensuite avec douceur.
- Mon facteur confiance est limité, docteur. Rien de personnel.
- Après tout, je vous ai presque tué cette nuit là … Je comprends aisément que le moindre mot sorti de ma bouche puisse être dénué d’une quelconque valeur, rétorqua Kirk en se baladant entre les tables sur lesquelles il s’adonnait à ses expériences et autres manipulations scientifiques. Batwoman restait stoïque, elle se contentait de l’observer silencieusement avant de se décider à avancer un peu pour examiner le matériel qu’avait à disposition le scientifique. Il remarqua l'intérêt qu’elle porta aux équipements.  Mon travail ici est un peu particulier…
- Je l’imagine très bien, puisque vous parcourez le ciel de Gotham sous la forme d’une horreur mutagène, siffla Batwoman en lui coupant la parole. Kirk laissa échapper un soupir d’exaspération qui n’échappa pas à la justicière. Voilà que désormais, les deux adversaires se tournaient autour au cœur du vaste laboratoire.
- Un effet secondaire malheureux d’un traitement expérimental visant à lutter contre la surdité, expliqua Langstrom avec un pragmatisme malvenu de l’avis de Katherine.
- Malheureux, dites-vous ? Allez dire ça aux familles de ceux que vous avez réduits en charpie sous cette usine.
- Ce n’était pas moi ! D’accord ? Pas vraiment ! s’offusqua le scientifique en frappant du poing contre une table. Désormais, Katherine pouvait tout à fait apercevoir son regard. Il était cinglant.
- Je doute que cette explication puisse tenir devant un tribunal, affirma Batwoman en soutenant son regard, continuant de se balader entre les cuves et espaces de travail.
- Le sérum que j’ai mis au point comporte un défaut majeur que je n’arrive pas à supprimer. Le but de ce sérum est de permettre aux gens atteints de surdités de percevoir les ultrasons comme le font les chauves-souris. Mais il semble que quelque chose ne corrobore pas dans la formule que j’ai élaboré puisqu’elle me transforme…
- … En monstre, acheva Katherine. Elle vous transforme en monstre dangereux, docteur.
- Soit vous vous montrez volontairement vexante. Soit, vous ne voulez pas comprendre… Le Docteur Langstrom se mit à fouiller la pièce des yeux.
- Vous êtes un danger pour cette ville, vos recherches doivent cesser !
- Lorsque je vous ai fait entrer ici, je souhaitais sincèrement que nous puissions coopérer. J’aurai pensé que vous seriez sensible… Il s’approcha d’une table pleine de tube à essais et autre matériel scientifique. Il se saisit d’une seringue. J’aurai pensé que vous seriez sensible au mal qui me ronge. La mâchoire de Batwoman se comprima brusquement.
- Posez-ça, immédiatement, articula t-elle, menaçante.
- Je ne vous laisserai pas détruire mon travail, déclara Kirk, l’air absent, le regard perdu. Il semblait se plonger dans le liquide violacé que contenait la seringue.
- Docteur Langstrom, pour la dernière fois… grogna Batwoman en épelant chaque syllabe le plus distinctement possible. Posez, cette seringue.
- Je ne vous laisserez pas m’arrêter, hurla Kirk, subitement enhardi. Il avait relevé ses yeux vers elle, il était animé d’une fougue hors du commun. Je ne vous laisserais pas briser l’espoir de millions de personnes à travers le monde. Il se tut brusquement, posa un dernier regarde sur le sérum, puis reprit. Je ne peux vous laisser vivre.
- Non ! s’égosilla Kate tandis que Kirk plongeait la seringue dans sa jugulaire pour en injecter tout le contenu en grimaçant. Bon sang ! hurla Kate en dégainant sa bat-griffe.




Elle visa le scientifique qui se tordait de douleur, encore debout, puis tira. Le câble s’enroula autour de l’un des bras du scientifique que Kate tira jusqu’elle d’un trait. Batwoman voulut porter un coup au visage de son adversaire, mais celui-ci fût plus rapide et la balaya violemment du bras. Le sérum agissait de manière ultrarapide à l’intérieur de l’organisme de son hôte, d’ores et déjà doté d’une force surhumaine, suffisante pour envoyer la justicière à l’autre bout de la pièce. Kate s’écrasa contre une table de dissection sur laquelle se trouvaient quelques chauves-souris desséchées. Lorsqu’elle releva la tête, elle vit Kirk tomber à genoux tandis que quelque chose semblait s’agiter sous sa peau. Quelquechose grouillait, ses os craquaient horriblement et arrachaient d'insupportables cris à Langstrom.

- C'est pas vrai ... murmura Kate en se relevant difficilement, quelque peu sonnée. Elle attrapa son synthétiseur à ultrason, prête à s’en servir tandis que les vêtements de Kirk se déchiraient sous la prise de masse éclair dont il faisait l’objet.

Sa veste et le pull qu’il portait volèrent en lambeaux et la peau sous ses triceps se déchira littéralement dans d’immondes gerbes de sang tandis que ses bras accouchaient de deux immenses ailes. Dans sa transformation, Kirk balayait tout ce qui se trouvait sur son passage, pris d’un accès de rage mêlé à une douleur hors du commun. Kate ne pouvait voir la transformation de son visage, c’était mieux ainsi, et tandis que la mutation du scientifique en chauve-souris géante s’achevait, il se retournait vers sa future victime pour laisser échapper un terrifiant hurlement strident. L’haleine fétide de cette monstruosité provoqua un haut le cœur chez Katherine, tandis que son costume était désormais recouvert d’une substance visqueuse assimilée à de la bave. Katherine, toujours un genou à terre, observa patiemment la créature s’approcher d’elle. Cette chose n’avait désormais plus rien d’humain, et pourtant, la conscience de Kirk Langstrom se trouvait là, quelque part, et chose étonnante, il semblait la reconnaître inconsciemment.

La bête approcha son visage immonde de celui de Kate qui, dans un effort surhumain, soutenait son regard meurtrier avec courage et détermination. Elle pouvait clairement ressentir le souffle immonde de la chose qui balayait ses cheveux roux à chaque expiration.

- T’as pas une gueule de porte-bonheur, déclara Kate en activant le synthétiseur ultrason, qu’elle gardait sous sa cuisse.

La chauve-souris mutante fut soudainement prise de spasmes et laissa échapper une longue et horrible supplique stridente. Il ne fallut que quelques secondes à l’appareil pour terrasser le monstre qui venait de basculer au sol, rampant lamentablement contre le sol éclatant pour tenter d’échapper à cette torture que lui infligeait Batwoman.

L’appareil fonctionnait à merveille et semblait synthétiser le doux chant du Black Canary. Un incroyable concentré de technologie. Bruce, tu ne cesseras jamais de m’étonner, murmura t’elle pour elle-même.

Elle ne remarqua qu’une troisième personne venait de s’engouffrer dans le laboratoire par une porte donnant sur une autre pièce. Un coup de feu retentit et le chant du Canary s’interrompit en grésillant. Une balle, probablement de calibre .45 avait transpercé l’appareil. Kate se retourna d’un bond. Une femme en blouse blanche d’un certain âge tenait un revolver entre ses deux mains. L’arme était braquée sur la justicière.

La chauve-souris mutante fut soudainement prise de spasmes et laissa échapper une longue et horrible supplique stridente. Il ne fallut que quelques secondes à l’appareil pour terrasser le monstre qui venait de basculer au sol, rampant lamentablement contre le sol éclatant pour tenter d’échapper à cette torture que lui infligeait Batwoman.

L’appareil fonctionnait à merveille et semblait synthétiser le doux chant du Black Canary. Un incroyable concentré de technologie. Bruce, tu ne cesseras jamais de m’étonner, murmura t’elle pour elle-même.

Elle ne remarqua qu’une troisième personne venait de s’engouffrer dans le laboratoire par une porte donnant sur une autre pièce. Un coup de feu retentit et le chant du Canary s’interrompit en grésillant. Une balle, probablement de calibre .45 avait transpercé l’appareil. Kate se retourna d’un bond. Une femme en blouse blanche d’un certain âge tenait un revolver entre ses deux mains. L’arme était braquée sur la justicière.

- Ôte tes sales pattes de mon mari, sal*pe  ! aboya Francine, menaçant d’abattre la justicière d’un instant à l’autre.
- Qu'est-ce que ...

Katherine n’eût pas le loisir d’achever sa phrase. La chauve-souris poussa un ultime cri de colère dans son dos et la projeta violemment contre celle qui venait de lui tirer dessus. Un second coup de feu se logea dans le plafond et les deux femmes glissèrent sur le sol, à moitié inconscientes. Le revolver glissa à quelques mètres d’elles.